Certaines choses existent pour être dites, pour être entendue. D'autres sont là simplement parce qu'il ne peut en être autrement. Ma propre histoire est trop longue pour être entièrement contée. Qui aurait la patience de s'intéresser à la vie d'un remortel, droite continue sans autres cessations que celle des infinis cycles de destruction qui rythme la création ? La création, voilà une idée intéressante. Je pourrais vous raconter des histoires d'entités cosmiques, perdues à des milliards de cube de leur lieu d'origine, je pourrais vous parler des horizons étoilés de mondes lointains, où le remortel n'a pas sa place. Je pourrais vous parler de la mémoire et du silence, le silence rugissant qui vous rend sourd, qui vous remplit la tête jusqu'à la faire exploser. Je crois que, le plus terrible, ce devait être le silence. Mais je préfère vous parler de la création, oui. C'est un mot qui en contient mille autres, qui recoupe tous les fils de l'existence, qui touche à chacun, intimement. Les remortels sont des demi-droites : un jour, ils connaissent l'existence, et celle-ci ne doit, en théorie, jamais se finir : ils accompagnent l'Univers dans son vieillissement, à travers le temps et l'espace. Chaque remortel doit connaître son origine. Si je connaissais la mienne, alors, peut-être... ... Peut-être saurais-je dire ce que j'ai fait, toutes ces années, avant d'avoir rejoint l'Ordre, avant même d'avoir été un ermite, pêcheur isolé dans sa cabane. Peut-être saurais-je dire quand je suis né, exactement.

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