Le tonnerre des sabots aux fers fraîchement changés résonnait dans la ruelle. De nuit, les faibles éclairages alentours ne laissaient voir des pavés inégaux que de vagues éclats brillants, la lune se reflétant dans les flaques amoncelées ça et là comme tant de pièges mortels où un cheval pourrait se tordre la patte. Désert, le passage laissait tout le champ à la monture de circuler à sa guise, emballée elle soufflait fort par le museau à chaque galop. Quand à sa cavalière, elle laissait traîner derrière elle une chevelure d'or ondoyante dans l'air nocturne alors qu'elle jetait parfois un regard rapide en arrière, cramponnée solidement à l'encolure de la bête, mord tiré, les cuisses solidement serrées autour des flancs de l'animal. Plus retentissant encore que l'allure effrénée de la cavalière, comme le grondement d'une tempête en approche de sabots aux éclairs tonitruants de pièces d'armure s’entrechoquant et de cris rageurs ponctués d'insultes bien choisies. Visiblement en fuite et pourchassée avec détermination, lancer un cheval déchaîné sur une allée de pierres humides n'était peut-être pas une si mauvaise idée, après tout. … « Tu crois que c'est une heure pour se lever ? Aller, debout, et on se dépêche !» Beugla une voix stridente et familière d'une vieille femme agacée. Effectivement, en ouvrant à demi les yeux pâteux de sommeil, Meyui put apercevoir quelque flots radieux de soleil pénétrer entre les fenêtres du dortoir. Midi ? Oui, au vu de l'inclinaison lumineuse, il devait être à peu près midi. « Ça y est, regarde, je suis presque debout. Déclara la jeune femme en guise de réponse, écartant d'un geste las la veste qui la couvrait en guise de couverture, laissant ses jambes nues basculer le long du hamac pour s'y tenir assise. - Ton premier rendez-vous ne devrait pas tarder à arriver, je te veux en bas avant qu'il ne passe le pas.» Se contentant de rajouter l'ancienne avant de se retirer. Tout en baillant à mâchoire décrochée, Meyui s'extirpa de sa piaule pour sauter lestement sur le parquet froid. Dans un coup d’œil circulaire elle chercha quelque chose à se mettre sur le dos, mais aucune fille n'avait laissé traîner quoi que ce soit, mis à part ce qui semblait être un pantalon en lin serré qui pendait dans le fond. Pas plus ? Et bien cette veste qui se trouvait sur elle ferait l'affaire. Le temps d'enfiler à la vas vite ces quelques pièces, de sauter dans ses bottes et de passer en coup de vent devant le miroir collectif pendant le biais à l'entrée du dortoir, et elle fut dehors. Dans les couloirs, elle gratifia les quelque passantes visiblement en plein travail d'un habituel sourire enjoué bien qu'encore sommeillante, son pas rapide faisait claquer le cuir de ses bottes au sol alors qu'elle arrangeait au mieux la tenue de fortune ramassée. Une fois devant la porte qu'elle devait franchir, elle prit le temps d'inspirer longuement, passer une main lente dans ses chevelure dorée pour lui donner une forme moins hirsute avant de pénétrer tout sourire dans la pièce. Début de la dernière journée, enfin ! Tard alors que chaque fille rentrait des cuisines pour aller discuter ou se reposer aux dortoirs, Meyui prit une route inhabituelle. Tout avait été prévu. La porte du bureau de la patronne avait été au préalable déverrouillée. En pénétrant dans la petite pièce, elle y trouva même une petite lampe faiblement allumée, juste assez pour éclairer la pièce sans être visible au dehors alors que la fenêtre ouverte à moitie laissait pénétrer un air frais dans la pièce, soulevant occasionnellement la paperasse qui traînait ça et là de quelque centimètres. Du grand travail, elle sourit largement devant la qualité du travail accompli. Selon les conseils de son contact, elle avait environ une heure avant que comme à son habitude la dirigeante revienne à ses bureaux pour y boire un verre. C'était bien plus qu'il ne lui en fallait pour... « Qui êtes vous et que faites vous ici ?» L'interrogeant une voix grave et sèche qui surgit sans crier gare dans le dos de l'intrus. Dans un sursaut, Meyui se retourna pour découvrir les traits enragés de la mégère qui officiait ici. D'abord surprise puis furieuse, elle recula à tâtons jusqu'à heurter aux hanches de bureau solide qui trônait au centre de la pièce, renversant quelque fournitures mal rangés. Pas le temps d'hésiter. Elle prit la fuite, saisissant quelque babioles brillantes qu'elle avait pu repérer à son entrée au passage avant d'enjamber le balcon qui se trouvait être miraculeusement ouvert sous le cris furieux d'appel à l'aide de la femme qu'elle laissait derrière elle. Tout ça pour rien, elle n'avait pu dérober que quelque petits objets de valeurs sans avoir le temps de chercher les documents voulu. Pas le temps de penser à ça, pensa-t-elle. Il faut fuir, déjà.

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