La chance n'avait jamais réellement été de son côté. Née dans une famille nombreuse, comptant une soeur et trois frères, tous aînés, elle avait toujours été rejetée, méprisée. Afin de couronner le tout, elle vivait au coeur d'un monde faible et pauvre, tandis que les riches dirigeants de la cité s'épanouissaient dans leurs demeures. Durant toute sa piètre existence, la petite n'avait que trimé. Elle n'avait fait que travailler, dans ce monde qui n'était pas le sien. Toutes les choses ont une fin, qu'elles soient bonnes, mauvaises, ou pire encore. Elle venait d'entrer dans l'adolescence. Toute la maison dormait, dans le froid glacial du pic où se trouvait la triste ville. Un courant d'air faisait vibrer le battant d'une fenêtre brisée, provoquant des bruits métalliques réguliers. Trois coups se firent entendre contre la porte de bois. Trois coups lourds, qui résonnèrent dans l'habitation vide. Le père de la jeune fille, un dénommé Andril, n'eut pas le temps de s'approcher de la porte. Celle-ci se détacha de ses gonds et s'abattit au sol, soulevant un important nuage de poussière. Dans l'embrasure de la porte, l'adolescente put contempler six gardes, vêtus d'armures noirâtres, usées. Le premier venu bouscula son père, qui, aussitôt, plaça ses bras protecteurs autour de ses autres enfants. La jeune fille était seule, et c'est elle qu'ils étaient venus chercher. Elle sentit une poigne de fer enserrer son maigre bras, et le sol de dérober sous ses jambes. Elle fut projetée au sol par la simple force brute du soldat. Un cri retentit à ses oreilles, pendant qu'elle se relevait faiblement. Avance. Tel était l'ordre qu'on lui donnait. Un coup de pied contre ses côtes la fit revenir à la réalité. Elle se releva rapidement, et partit, entourée par cinq gardes munis d'épées de fer. Elle put voir celui qui dirigeait cette troupe glisser une bourse entre les mains de son père. Tel était le prix pour la dénonciation d'un élément perturbateur dans la société. Elle fut guidée jusqu'aux frontières du pays. Jusqu'à l'entrée du pays qu'elle surnommait "Terre sans retour", où tous les rebuts de l'humanité, les estropiés, les êtres laids, les personnes représentant un danger, attendaient la mort. Aucune personne ne pouvait survivre, en ces terres désolées. Pas même elle.

Along the shore the cloud waves break, The twin suns sink beneath the lake, The shadows lengthen In Carcosa. Strange is the night where black stars rise, And strange moons circle through the skies But stranger still is Lost Carcosa. Songs that the Hyades shall sing, Where flap the tatters of the King, Must die unheard in Dim Carcosa. Song of my soul, my voice is dead; Die thou, unsung, as tears unshed Shall dry and die in Lost Carcosa.